Présidentielle au Congo : fin du vote, l’opposant de Sassou évacué vers la France

Une attente de plusieurs jours a commencé après la fermeture des bureaux de vote dimanche soir au Congo-Brazzaville, où le président sortant, l’indétrônable Denis Sassou Nguesso, compte l’emporter dès le premier tour face à six rivaux qui redoutent des fraudes sur fond de coupure d’Internet.

Le principal adversaire de M. Sassou Nguesso, Guy-Brice Parfait Kolelas, a été évacué dans l’après-midi par avion médicalisé vers Paris après avoir été déclaré positif à la COVID-19 vendredi, a indiqué son équipe de campagne.

Je me bats contre la mort, mais cependant, je vous demande de vous lever. Allez voter pour le changement, avait-il lancé samedi dans une vidéo.

Coupé par les autorités dans la nuit, Internet devrait être suspendu jusqu’à l’annonce des résultats provisoires, dans le courant de la semaine.

La seule incertitude est quel score monsieur Sassou demandera à la Commission électorale prétendument indépendante de lui attribuer, a ironisé le célèbre romancier congolais Emmanuel Dongala, joint à son domicile aux États-Unis.

C’est dans un climat de paix que la campagne électorale s’est déroulée. Je crois que ceci est un bon signe pour notre démocratie, s’est félicité pour sa part Denis Sassou Nguesso, 76 ans, dont 37 au pouvoir, après avoir voté à Brazzaville.

Je souhaite que le processus se poursuive ainsi jusqu’à son terme, a dit le président, qui a fait campagne sous le slogan Un coup, K-O pour dire sa volonté de gagner dès le premier tour.

Aucun incident majeur n’a été enregistré lors de cette journée de vote sous haute surveillance, selon les éléments que l’AFP a pu collecter sur le terrain et par SMS, également coupés dans la journée.

Les Congolais ont boudé les urnes

À Brazzaville, seuls les véhicules détenteurs d’un sauf-conduit étaient autorisés à circuler. Les commerces étaient fermés. Seuls les membres des forces de sécurité étaient visibles au centre-ville.

Globalement, les Congolais ont boudé les urnes. Les bureaux de vote étaient vides. Il n’y avait pas l’affluence de 2016, relève Brice Makosso, de la société civile à Pointe-Noire.

À Brazzaville, 101 électeurs sur 135 ont voté dans un bureau du quartier Poto-Poto plutôt pro-pouvoir, a constaté un correspondant de l’AFP. Dans un autre bureau du quartier de Ouenzé, seules 80 personnes sur 800 inscrits avaient voté à 16 h 30.

À Brazzaville comme à Pointe-Noire, les seuls délégués politiques présents dans les bureaux de vote étaient souvent des représentants du Parti congolais du Travail (PCT), l’inusable parti au pouvoir, a constaté l’AFP et une source de la société civile. En certains endroits, des électeurs se sont plaints de ne pas trouver leur nom sur les listes électorales ou les listes d’émargement.

Ces problèmes d’organisation expliquent la faible participation, d’après l’autre candidat majeur de l’opposition, Mathias Dzon, en citant l’exemple de son bureau de vote.

J’habite dans le secteur, je constate que des électeurs n’ont pas eu leur carte. C’est seulement ce matin qu’on a tenté de venir les déposer chez moi parce que j’ai appelé le président de la commission électorale, a-t-il déclaré.

L’Église catholique a émis des réserves sur la transparence du scrutin. Ses observateurs électoraux n’ont pas obtenu d’accréditations. Une vingtaine d’observateurs de l’Union africaine seulement se sont déployés, officiellement en raison de la COVID-19.

Les électeurs ont voté librement par rapport à 2016, a déclaré leur chef de mission, Dileita Mohamed.

Les adversaires du président sortant ont déjà dénoncé le vote anticipé jeudi des membres des forces de sécurité (entre 55 et 60 000), source de fraude potentielle selon eux.

L’indétrônable Sassou Nguesso

M. Sassou Nguesso a dirigé le Congo entre 1979 et 1992, à la tête d’un régime de parti unique. Il a été battu lors des premières élections pluralistes en 1992 par Pascal Lissouba, mais ce très rare exemple d’alternance pacifique en Afrique centrale a pris fin en 1997 avec le retour au pouvoir de M. Sassou Nguesso, après une guerre civile dont il est sorti victorieux.

En 2015, il a fait sauter le verrou constitutionnel qui imposait une limite d’âge et restreignait à deux le nombre de mandats présidentiels.

Cette année, les autorités ont refusé de délivrer à la conférence épiscopale – qui a émis des réserves sur la transparence du scrutin – l’accréditation lui permettant d’envoyer des observateurs dans les bureaux de vote. Elles ont également refusé d’accréditer une journaliste de RFI.

Un militant des droits de la personne, Alexandre Dzabana, a été arrêté dix jours avant le scrutin, accusé d’être impliqué dans une tentative de déstabilisation des institutions, selon le gouvernement.

Le climat semble moins lourd qu’en 2016, lorsque la réélection contestée de M. Sassou Nguesso avait déclenché une violente rébellion dans la région du Pool, entre Brazzaville et Pointe-Noire.

Frédéric Bintsamou, alias le pasteur Ntumi, qui en avait pris la tête, a souhaité cette année que l’élection se déroule dans la paix, la transparence et le respect des règles du jeu.

Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a appelé toutes les parties prenantes à œuvrer en faveur d’un processus électoral apaisé.

SOURCE : RADIO CANADA

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